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LA SAUVEGARDE DU BAUDET DU POITOU
L'âne du Poitou (ânesse et baudet) est le plus ancien des ânes. Il ne peut être confondu avec l'âne commun... "I1 constitue une aristocratie dans l'espèce, une caste privilégie fort peu nombreuse faisant l'objet d'un élevage particulièrement surveillé et d'un commerce fructueux" (Léon SAUSSEAU, 1925).
Il est sans doute l'élément principal de la qualité de la production mulassière poitevine et améliore de même la production des juments des autres races. De ce fait, le Baudet du Poitou est depuis sélectionné pour la production de mules.
La "grande espèce" Asine du Poitou est en effet une réalisation millénaire de l'agriculture et de l'élevage du sud de cette province : union d'une très grande masse avec une grande finesse de tissus, comme le prouve la ténuité du long poil soyeux de sa robe, ce à quoi on a toujours attaché un grand intérêt (baudets bourailloux ou guenilloux).
Pour des raisons différentes les deux espèces du genre Equus, les chevaux et les ânes, ont été utilisées par l'homme. L'âne a été domestiqué avant le cheval. L'âne servait aux paysans et aux marchands. Le cheval, d'abord chassé pour sa viande, devint la monture des guerriers avant d'être sélectionné en races aptes à tous les usages.
L'idée est venue de croiser ces deux espèces pour obtenir des animaux hybrides qui combineraient les qualités bien différentes de l'âne et du cheval. Ce croisement entre les deux races est possible de deux façons :
• soit entre le cheval (étalon) et une ânesse, ce qui donne le bardot;
• soit entre un âne (baudet) et une jument pour obtenir une mule ou un mulet.
C'est le croisement baudet + jument qui a été préféré de tous temps. L'hybride obtenu de sexe mâle est le mulet, celui de sexe femelle, la mule. Sauf cas exceptionnels, mules et mulets sont stériles et ne peuvent donc pas se reproduire.
Les difficultés rencontrés par les éleveurs pour obtenir par ce croisement peu naturel des mules et des mulets les ont conduits à sélectionner les ânes et les juments les plus aptes à cette production.
"Toute jument n'est pas mulassière, c'est une race particulière au Poitou, spécialement propre à cette production... pour qu'une jument produise des mules; il lui faut des dispositions occultes et inconnues..." d'Availles, 1864) La jument mulassière est issue du croisement des chevaux poitevins (aujourd'hui disparus) et des chevaux Brabancons venus de Hollande et de Belgique pour assainir le Marais Poitevin. C'est ainsi que les mules engendrées par l'accouplement du Baudet du Poitou et d'une jument qualifiée de "mulassière" furent pendant très longtemps les plus appréciées de France et sans doute d'Europe et du monde entier. Eugène AYRAULT, vétérinaire à Niort, estimait en 1867 à plus de 18 000 le nombre de mules et de mulets mis en vente chaque année dans le Poitou.
Un siècle plus tard, l'évolution des techniques et les transformations du monde agricole rangeaient la production mulassière dans les pratiques dépassées. Le Baudet du Poitou restait à l'esprit comme l'image même de l'ancien temps. Ses mérites furent oubliés. La race elle-même manqua de disparaître à jamais, faute d'effectifs.
Pourtant des efforts sont faits pour préserver et améliorer la production mulassière. En 1884 est mis en place le stud-book (livre généalogique) répertoriant les animaux selon des caractéristiques spécifiques : le baudet du Poitou doit avoir une grosse tête, les oreilles longues garnies de poils longs. Sa robe est bai brun avec de longs poils frisés et soyeux. Il doit avoir des membres puissants, les pieds larges et ouverts, recouverts de poils, une taille de 1,40 à 1,50 m au garrot pour les mâles, et 1,35 à 1,45 m pour les femelles.
Aux centaines d'ânes du Poitou du siècle dernier, ne succédaient plus en 1975, qu'une poignée d'animaux maintenus par la vigilance de quelques éleveurs encouragés par l' Administration des Haras Nationaux qui les aident encore aujourd'hui à organiser des concours mulassiers.
Aussi, était-il urgent d'entreprendre une opération de sauvegarde de la race Asine du Poitou.
• en 1977, une enquête réalisée par Annick AUDIOT, élève-ingénieur, indiquait clairement la disparition probable de la race des baudets du Poitou avant la fin de ce siècle par manque de reproduction du cheptel existant et surtout par indifférence générale.
• en 1978, il reste environ 60 baudets du Poitou en France. Le constat de la disparition de nombreuses races domestiques et la perte de la diversité‚ biologique est générale, d'où la nécessité‚ d'une conservation du patrimoine génétique.
• en 1979, eut lieu une réunion décisive au siège des Haras Nationaux à Paris regroupant tous ceux que la disparition annoncée du Baudet du Poitou ne laissait pas indifférents. Des décisions importantes concernant l'opération de sauvegarde furent prises :
- effectuer un recensement de tous les spécimens d'ânes du Poitou.
- créer un livre A (Stud-book) pour recenser les sujets de race pure et un livre B pour connaître les sujets croisés (ceux ayant un parent de la race asine du Poitou et l'autre de la race commune car le caractère Poitevin domine et peut porter à confusion)
- prévoir la création d'une asinerie expérimentale aux fins d'amélioration génétique, de perfectionnement des techniques d'élevage, de recueil des traditions et d'information du public.
• en 1980, création de l' Asinerie nationale expérimentale du Baudet du Poitou à la Tillauderie sur la commune de DAMPIERRE/BOUTONNE (17) par les Haras Nationaux et le Parc Naturel Régional du Marais Poitevin, les Conseils Généraux de Charente Maritime et des Deux-sèvres pour lutter contre la consanguinité.
• en 1988, création de l' Association pour la Sauvegarde du Baudet du Poitou (la SABAUD) à l'initiative du docteur vétérinaire Jacques Fouchier, ancien ministre et ancien parlementaire des Deux-Sèvres.
Yann MORCEAU
Asinerie de la Baie
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